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succès littéraire 2012

  • La liste de mes envies - Grégoire Delacourt - Editions JC Lattès

    liste de mes envies.jpgOn ne présente plus Grégoire Delacourt en ce début d'année 2012. Un auteur qui a acquis, en quelques mois, une certaine notorioté (cinq prix à son actif pour "l'écrivain de famille")

    La liste de mes envies est arrivée un beau matin dans ma boite aux lettres, et fut lu en quelques jours, étant alors condamnée à rester quasi-immobile. 

    D'emblée, le style me plaît. La plume est alerte, vive. La lectrice que je suis, est prise dans la vie de cette mercière arrageoise. Jocelyne n'est pas top-model, mais elle est elle. Elle s'aime, elle s'assume.

    "Je regarde mon corps, mes yeux noirs, mes seins petits, ma bouée de chair, ma forêt de poils sombres et je me trouve belle et je vous jure qu'à cet instant, je suis belle, très belle même." (page 12). Quelle femme Jocelyne ! Sous la plume de Grégoire, nos défauts physiques deviennent alors beauté, vérité et sincérité. Et ça, ça me touche. 

    La relation mère-enfant est aussi présente, avec des mots qui retentissent en moi, qui m'interpellent. "Nous conjuguions le silence elle et moi : regards, gestes, soupirs en lieu et place de sujets, verbes, compléments" (page 25). Cette phrase touchante est le juste miroir de beaucoup de relations mère-enfant, face à l'incompréhension. Grégoire y injecte simplement un brin de poésie qui ne peut laisser indifférent. 

    Son personnage est très attachant. Les descriptions, tant physiques, que mentales, que psychologiques sont d'une extrème justesse, touchantes et attachantes. Grégoire maîtrise les mots, et sait les marier les uns aux autres. 

    Au-delà de son talent d'écrivain, Grégoire nous embarque dans l'histoire tragique de Jocelyne et Jocelyn, son mari. 

    Jocelyne gagne une certaine somme d'argent à une loterie, cache son gain à sa famille, à son entourage. Elle découvre les dessous de la richesse, les prix exorbitants de Chanel, et de ses grandes enseignes luxueuses. Mais au fond, est-ce de cela dont elle rêve ? 

    Blogueuse, en plus de mercière, elle se complait dans sa vie simple mais heureuse. Ce gain va l'interroger sur le sens du mot bonheur, sur ce qu'est le bonheur dans la vie de tous les jours. Peut-on être heureux avec des millions en poche ? Quelle confiance accorder aux gens de notre famille, de notre entourage, quand on devient millionnaire ? 

    "Être riche, c''est voir tout ce qui est laid puisqu'on a l'arrogance de penser qu'on peut changer les chose. Qu'il suffit de payer pour ça. Mais je ne suis pas riche [...] Je possède juste la tentation. Une autre vie possible. Une nouvelle maison. une nouvelle télévision. plein de choses nouvelles. Mais rien de différent". (page 101-102)

    Toutes ces questions, Jocelyne se les pose. Au fil des jours, elle va lister ses envies, et s'apercevoir que les millions gagnés peuvent y contribuer, mais ce à quoi elle aspire, ne peut se payer avec quelques euros. Et puis, cette descente aux enfers, et ce séjour niçois, où les soeurs dominicaines vont lui réapprendre à vivre. "Les infirmières me réapprirent doucement le goût des choses [...] Comme on réapprend à se trouver jolie ; à se mentir et à se pardonner. Elles effacèrent mes idées noires, éclaircirent mes cauchemars. Elles m'apprirent à placer ma respiration plus bas, dans le ventre, loin du coeur." (page 151)

    Jocelyne va aussi rencontrer l'amour et les premiers émois d'un homme qui vous regarde et vous embrasse, vous désire. "C'est un baiser rare, inattendu ; un baiser tiède au goût d'océan Indien. C'est un baiser qui dure, un baiser qui dit tout ; mes manques, ses désirs, mes souffrances, ses impatiences. Notre baiser est mon ravissement ; ma vengeance" (page 114)

    Et puis, on ne peut rester indifférent à ses doux moments entre Jocelyne et son père. Le désarroi d'un enfant face à son parent qui ne le reconnaît plus, qui est là, mais la tête ailleurs. De très beaux moments où l'émotion est présente. 

    Une très belle histoire, une très belle vision du bonheur, de la vie et du sens que l'on veut bien donner à notre propre vie. Un auteur à suivre, et pour ceux qui n'ont pas lu "L'écrivain de famille", je vous le conseille. 

    J'aimerai avoir la chance de décider de ma vie, je crois que c'est le plus grand cadeau qui puisse nous être fait. Décider de sa vie (p44)

     

  • A cause d'un baiser de Brigitte Kernel - Editions Flammarion

    A cause d'un baiser, Brigitte Kernel, roman français, nouveauté littéraire 2012, flammarion, guillaume robert, fais moi oublier, littérature française

    Après quelques années d'absenteisme, Brigitte Kernel nous revient en ce début d'année 2012, avec une plume toujours aussi émouvante, une plume maîtrisée, douce et pertinente. 

    L'auteur nous livre, à travers ce roman, une kyrielle de sentiments, une hotte de bonheur, et interpelle notre moi à chaque page. 

    L'histoire met en scène, au premier plan, trois femmes. Trois femmes tourmentées par le sentiment d'amour qui les habite. L'héroïne aime Léa avec qui elle vit depuis trois ans, et est perturbée par le baiser que Marie lui a donné. Un baiser doux, sensuel et long, très long. 

    Au fil des pages, nous découvrons les tourments que peuvent causer un baiser, les questionnements sur le sentiment amoureux, l'importance de notre passé dans nos actions et réactions. 

    Je ne vous dévoilerai pas le dénouement de ce roman, vous en laissant la surprise. Cependant, la lecture de ces quelques trois cents pages mérite un partage. 

    Si l'héroîne se demande si l'on peut aimer deux personnes à la fois, Léa peut aussi se poser la question. Au fond, n'est-elle pas encore amoureuse de Louise ? "Mieux vaut croire qu'on a moins aimé la personne disparue, c'est plus facile ensuite de reprendre le cours de sa vie et de ses amours" (p 145).  Louise partie trop tôt, mais dont on hume la présence tout au long du roman.

    Aimer deux personnes à la fois, qui ne s'est jamais posé la question ? Qui n'a pas eu ce sentiment un jour ? Dans quel état sommes-nous face à deux personnes que l'on aime ? Brigitte trouve les mots pour dépeindre notre intérieur en telle circonstance : "Dans mon corps, s'écroulaient murs, fondations, toits, populations d'images, de souvenirs, de promesses, mais aussi monceau de projets et de certitudes. Une vie en éboulis." (p 12)

    Un voyage au Cercle Polaire pour tenter de "recoller" les morceaux, nous fait découvrir une région inconnue, et me donne l'envie de m'y rendre dans les années à venir pour voir, sentir et rencontrer ce "monde" dans lequel Brigitte Kernel embarque son lecteur. 

    Le retour à Paris ne sera pas si facile pour nos deux amoureuses. Il sera même plus difficile que prévu, puisque Marie entre de nouveau dans la vie de notre héroïne. Une séparation d'avec Léa pour mieux se re-construire, puis une vie commune qui reprend malgré ce baiser, malgré le chamboulement intérieur pour nos amoureuses. Notre héroïne, confrontée à la solitude, à la perte de ses repères, dont elle n'avait pas conscience jusqu'alors, nous entraîne dans ses réflexions sur la vie quotidienne, sur la vie à deux, sur la perte de la personne que l'on aime : le réveil n'est plus aussi doux, plus l'envie de travailler, l'effondrement de soi, de rituels quotidiens qui manquent. L'occasion aussi de s'apercevoir que Léa ne dispensait aucun baiser, n'embrassait jamais. Pourquoi ? Léa qui continue, malgré les années qui se sont écoulées, à s'habiller avec les vêtements du temps de Louise. Au fond, Louise est bien présente malgrè son décés et donc son absence physique.

    "C'est quand l'on souffre de ne plus pouvoir partager avec celui ou celle dont on s'est séparé que l'on prend conscience de l'amour qui pulse encore dans les artères. On ne peut pas se vider de son sang sans mourir, on ne pas sortir de sa peau son amour s'il est toujours vivace" (p 283). Quelques mots qui brossent avec justesse ce sentiment de vide quand notre moité s'en va. 

    Au-delà de l'histoire d'amour, j'ai été très touchée par la relation de l'héroïne avec son papa. Ce papa qui ne sait plus, qui ne reconnaît plus sa fille, qui vit dans un autre monde, son monde. La maladie d'Alzheimer est contée ici avec une infini tendresse, et c'est beau. Tendre cette relation avec le père qui n'est plus.

    Un roman qui ne peut laisser indifférent tant il est le témoin de nos ressentis intérieurs que l'on n'ose dire, partager. La douleur qui nous tiraille, douleur de l'amour, douleur de la maladie d'Alzheimer...Tant de douleurs que Brigitte Kernel sait conter. Sa plume dessine le contour de notre moi, incise nos peurs, nos ressentis, nos émotions.

    Merci Brigitte.


    Brigitte Kernel sera le samedi 4 février 2012

    à la librairie Violette and CO

    102 Rue Charonne - PARIS 11ème